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[Test] Immortality

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A l’instar d’un Lucas Pope ou d’un Jonathan Blow, Sam Barlow (Her Story, Telling Lies) fait partie de ces créateurs qui, lorsqu’ils sortent un jeu, forcent notre attention. Sa particularité ? Proposer du jeu d’auteur de qualité à une communauté de fans fidèles dont il a su mériter la confiance. Une fois encore, Barlow frappe fort avec son nouveau concept, toujours basé sur de la prise d’images réelles, et sur une narration omniprésente. Une fois encore, il nous emporte dans son univers sans concessions…

Her stories

Avant d’entrer dans le vif du sujet, il me semble indispensable de décrire très rapidement le gameplay de ses 2 premiers jeux pour que vous ayez son contexte créatif.

Sam Barlow se cantonne à ce qu’il aime : le jeu d’enquête, le thriller, le polar, l’étrange même parfois. Dans chacun de ses jeux vous n’aurez qu’un seul but : fouiller et découvrir “une” vérité – la vôtre. Celle que vous allez vous fabriquer en fonction des extraits que vous découvrirez.

Dans Her Story, en tapant des mots clés dans une console de recherche de la Police on devait retrouver des archives du témoignage vidéo d’une jeune femme et ainsi retracer son histoire. Les vidéos étaient toujours face cam, seule l’héroïne apparaissait à l’écran, en huis clos, à des dates et heures différentes. Voici d’ailleurs les seuls indices qui vous permettront de vous situer dans une chronologie narrative. Au final : Barlow nous livrait là un jeu indé avec peu de moyens mais un concept fort. C’est ce qui l’avait fait remarquer à l’époque, une marque qu’il gardera dans ses créations suivantes.

Dans Telling Lies, c’était un peu le même principe. Mais cette fois c’était un groupe de plusieurs personnes différentes que l’on suivait, filmées face (web)cam, par elles-mêmes. Le joueur avait alors entre les mains un laptop volé à la NSA dont il fallait utiliser le moteur de recherche. Cette fois encore cet outil permettait, en tapant des mots clés, de découvrir une liste de vidéos  permettant de retracer l’histoire des personnages.

Dans Immortality, l’auteur creuse son concept en y apportant une touche d’originalité : plutôt que de taper des mots-clés dans une console, vous allez cliquer sur des éléments de la vidéo qui tourne et ainsi être amené vers une autre vidéo.

Par exemple : si vous regardez une vidéo où l’on voit une femme chanter au micro, cliquer sur le micro va vous permettre de découvrir une nouvelle vidéo incluant le micro comme élément de décor. Là où Sam Barlow fonctionnait par associations d’idées grâce au texte, il fonctionne ici par associations d’idées via l’image. Et ça, c’est tout nouveau.

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Côté histoire, on vous explique en quelques lignes dès le début qu’Immortality se centre sur une jeune actrice, Marissa Marcel, promise à une grande carrière. Pourtant, celle-ci n’a fait que 3 films dans sa vie : en 1968, 1970, puis après près de 30 ans d’absence, en 1999. Absence dont il nous faudra bien évidemment découvrir la raison…

Kinoton

Les vidéos que vous aurez sous les yeux sont une compilation d’extraits de films et de making of, mais aussi de plateaux télé (façon “Tonight shows”), de pubs, etc.

Et c’est tout.

Il faut être préparé quand on joue à un jeu de Sam Barlow parce qu’on n’est pas du tout aidé : il n’y a pas de quêtes, pas ou peu d’explications. Vous êtes juste face à une liste de vidéos qui s’allonge et vous allez devoir découvrir par vous-mêmes de quoi il retourne.

Immortality a un côté très Lynchien qui ajoute de l’inquiétant voire du fantastique à sa narration. Et il est Lynchien tant dans l’esthétique que dans ses thématiques, ce qui accentue son côté « niche » et exclura probablement une partie des joueurs qui s’y frotteront par hasard. Jeu de l’écurie Game Pass oblige, Immortality va forcément se retrouver entre des mains non averties…

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Immortality parle de beaucoup de choses : du procédé cinématographique bien sûr (qui évolue beaucoup entre 1968 et 1999), mais aussi du traitement des femmes dans le milieu hollywoodien, des luttes de pouvoir dans une équipe de tournage… ainsi que d’autres thématiques beaucoup plus étranges, parfois effrayantes… J’ai vécu de vrais instants de terreur dont je ne peux malheureusement rien vous dévoiler pour ne pas vous spoiler.

En effet, Immortality est un jeu à apparences, un vernis qu’on vous invite à gratter.

Au début, vous allez frénétiquement cliquer sur tous les extraits vidéo pour tenter de dévoiler le plus possible de nouveaux extraits. Puis à l’aide des outils fournis vous allez les décortiquer (on peut passer image par image / rembobiner / trier les vidéos par date ou film, etc.). Jusqu’à cibler de mieux en mieux vos recherches… et découvrir votre propre vérité.

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Coupez !

Immortality est une oeuvre interactive à la frontière du jeu vidéo tel qu’on l’entend. 

Avec près de 200 extraits à découvrir, on est sur un jeu généreux qui a déployé beaucoup de moyens. C’est un hommage continu au cinéma dont on voit l’esthétique et la technique évoluer entre 1968 et 1999. Inutile d’être un grand psychologue pour comprendre que ce jeu est fait par un amoureux du cinéma ET du jeu vidéo : tous les cadrages sont travaillés et mis au service du jeu. La mise en scène, les jeux de lumière, etc. mettent en avant des éléments du décors qui nous incitent à cliquer et à avancer dans notre découverte du jeu.

En un mot comme en cent, Immortality montre une fois de plus ce que l’on est capables d’offrir en terme de créativité à travers ce média. Unique en son genre, il est à découvrir de toute urgence par les fans de jeux qui sortent des sentiers battus. Et pour ceux qui doutent, passer par l’offre Game Pass leur permettra d’y goûter sans trop débourser au passage…

On a aimé :

  • La générosité du contenu
  • La déclaration d’amour sincère au cinéma
  • Le twist de gameplay qui prend pas surprise

On a moins aimé :

  • Les quelques ralentissements
  • La navigation parfois un peu laborieuse

Craquez vos PO si :

  • Vous êtes un vendu de Sam Barlow
  • Vous aimez sortir des sentiers joués
  • Vous êtes un cinéphile avide de nouvelles expériences vidéoludiques

Quittez la partie si :

  • Les jeux intellectuels, c’est pas pour vous
  • Vous cherchez un défouloir de fin de semaine
  • Les jeux sans quêtes et points d’XP, ça vous angoisse

Immortality – Half Mermaid

Xbox / PC

16,79€

Une œuvre immortelle

Une fois encore, Barlow frappe fort avec son nouveau concept, toujours basé sur de la prise d’images réelles, et sur une narration omniprésente. Une fois encore, il nous emporte dans son univers sans concessions et nous délivre sa création la plus aboutie...

8.5
Note finale:
8.5

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