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[Test] South Park : L’Annale du Destin

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Le temps n’a définitivement pas la même allure à South Park et dans notre monde réel. 3 ans après l’excellent South Park : Le Bâton de la Vérité, notre équipe de gamins pétomanes préférés est de retour dans une aventure se déroulant à peine quelques minutes après le joyeux bordel aux accents fantasy. Cette fois, on est plongé dans l’univers du Coon, de ses amis et de ses ennemis pour revisiter les super-héros et les univers cinématiques de ces derniers. Ubisoft San Francisco a succédé à Obsidian pour ce South Park : L’Annale du Destin, alors la question qui se pose est : le petit nouveau de la saga est-il à la hauteur de son grand frère ?

Alors que le New Kid mène l’assaut final contre la forteresse – ce même assaut qui constituait le point final du jeu précédent -, Cartman et ses amis décident soudainement que les mages, les voleurs et autres juifs (je parle de la classe de personnage du jeu, entendons-nous bien) sont devenus ringards. A partir de maintenant, ce qui est cool, ce sont les super héros. Et c’est d’autant plus vrai que Netflix est prêt à acheter n’importe quel pilote contenant ces humains aux super-pouvoirs et que ce serait l’occasion parfaite de lancer un Coon Cinematic Universe (l’équivalent South Parkien du Marvel Cinematic Universe où Cartman est le dénommé Coon, un super-héros/raton laveur). De quoi motiver nos petits gaillards. Oui mais voilà : comme d’habitude, Eric entend se tailler une plus grosse part du gâteau que les miettes qu’il laissera à ses amis et ça, ça énerve. Les Freedom Pals se forment alors avec le même objectif que les Coon & Friends et cela enclenche une Civil War version South Park. La première équipe à réunir assez d’argent pour financer le pilote pour Netflix emportera le butin.

Friendly faces everywhere…

Tout comme pour Le Bâton de la Vérité, South Park : L’Annale du Destin a l’ambition d’inviter le joueur dans un épisode long d’une quinzaine d’heures (pour la trame principale) qui seront l’occasion de faire un nombre incalculable de références à la série et de retrouver la galerie de personnages complètement barrés qu’elle nous a appris à aimer. La recherche du chat perdu, premier objectif dévoilé du jeu, ne sera d’ailleurs évidemment qu’un prétexte pour balancer le joueur au milieu des magouilles de mafieux, des affrontements contre les élèves de sixième ou encore des guest stars récurrentes comme Morgan Freeman. Evidemment, cela suppose donc que vous soyez réceptifs à l’univers et à l’humour de la série d’origine. Si ce n’est pas le cas, passez directement votre chemin parce qu’ici, aucune blague pipi-caca ne vous sera épargnée et vous aurez bien du mal à suivre la logique de certaines scènes si le PC Principal ne vous évoque qu’un « Qui ça ? ».

Morgan Freeman vous fournira de précieux conseils concernant... Vos pets
Morgan Freeman vous fournira de précieux conseils concernant… Vos pets

On prendra plaisir également à voir le jeu enchaîner les situations ou les références à tous les thèmes abordés par South Park ces dernières années. Pourtant, très vite, on tombera sur une impression de checklist thématique. Beaucoup de sujets sont évoqués (du genre au racisme en passant par l’addiction et le politiquement correct) mais au final très peu sont traités avec suffisamment de persévérance pour donner un fond cohérent et intéressant à l’ensemble. Ça sent le cahier des charges à respecter. De même, là où Le Bâton de la Vérité marquait par sa critique juste des médias incriminés, L’Annale du Destin reste sur une rigolade superficielle qui manque cruellement de mordant, préférant tout miser sur les blagues de prout jusqu’à l’overdose. On se retrouve donc assez souvent à sourire mais assez rarement à rire à gorge déployée et encore moins à se dire qu’un moment est marquant. Evidemment, on imagine mal comment le jeu aurait pu aller plus loin que la critique des jeux vidéo faite par son prédécesseur. Toutefois, on aurait aimé qu’il croque avec autant de passion et de savoir-faire les comics et le cinéma, sans oublier la TV et la VOD.

… Humble folks [with some] temptations

Qui dit changement de studio dit « petite touche apportée ». Et de ce côté là, il n’y a pas à dire, on sent bien la patte d’Ubisoft. Côté combat, un vent de fraîcheur s’abat sur la licence en se tournant plutôt vers le tactical. Les personnages se déplacent à présent sur une grille et leur placement déterminera quels adversaires ils peuvent attaquer suivant le pouvoir choisi. Certains attaquent une case adjacente au placement, d’autres une ligne ou une colonne et d’autres encore sont des attaques de zone, sans oublier celles avec une certaine distance d’attaque. Il y a évidemment le retour du système de DoT à base de saignements, de brûlures ou même de dégoût (et pourquoi pas ?) qui provoquent des dégâts après chaque action et certains ennemis font des attaques chargées (comme préparer un ballon rempli d’urine avant de le lancer sur 5 cases), vous poussant à faire déguerpir vos larrons tant qu’il en est encore temps. Une jauge d’équipe se remplit pendant le combat, débloquant une attaque ultime – différente pour chaque personnage – avec une animation épique (du moins dans l’esprit South Parkien). Une recette pour un tactical simple – on reste loin d’un autre jeu de la firme, Mario + The Lapins Crétins : Kingdom Battle – mais efficace. On sent malheureusement que le système de combat a fait l’objet de beaucoup de remodelages (ce qui se vérifie en regardant à nouveau ce qui avait été montré lors des différents salons au cours du temps) et que cette formule efficace n’a été trouvée que trop tard pour accoucher du meilleur de ce dont le studio était capable : les alliés se différencient trop peu les uns des autres et les phases de combat deviennent petit à petit ennuyeuses malgré l’ajout au compte-gouttes de capacités spéciales – comme celle de voler le tour de votre adversaire – déclenchées par les pets magiques du New Kid. Dommage.

Le Capitaine Diabète sera l'un de vos premiers alliés. Il n'a pas son pareil pour renverser des objets lourds.
Le Capitaine Diabète sera l’un de vos premiers alliés. Il n’a pas son pareil pour renverser des objets lourds.

Autre changement de taille où l’on sent l’empreinte de l’entreprise des Guillemot : l’héritage du monde ouvert. Là dessus, on peut dire que le bilan est plus mitigé. D’un côté, South Park : L’Annale du Destin est bourré à ras bord d’objets à collecter allant du simple skin – comme les très nombreux costumes – aux objets utiles – comme des runes améliorant certaines statistiques du New Kid -en passant par les objets pour complétistes (il y a par exemple une quête optionnelle qui vous demandera de récupérer tous les chat d’Al Super Gay), ce qui pousse à profiter du monde du jeu, à explorer à fond South Park pour découvrir la moindre blague. D’un autre côté, ça donne un assez grand nombre de quêtes dites « FedEx » n’ayant que très peu d’intérêt scénaristique.

Y a un agent, m’sieur le problème ?

On en arrive à ce qui est, à mon avis, le plus gros problème du jeu : sur les 15 heures de la trame principale, les 10 premières peinent à ferrer l’intérêt du joueur. La faute à un scénario décousu dont le propos central ne se révèle qu’au bout des 2/3 du jeu, laissant avant cela la place à des saynètes certes sympathiques mais donnant plus l’impression de passages que le studio se sentait obligé d’intégrer. On déplore également que les quelques choix que l’on fait pour construire la fiche du personnage aient si peu de conséquences. En effet, le jeu affirme que plus la couleur de peau du New Kid sera foncée, plus il sera difficile d’interagir avec les habitants de la ville mais la gêne reste minime. Dans le même esprit, la première discussion avec Monsieur McKay concernant le genre de votre personnage est suivie par une attaque de rednecks vous sommant de quitter la ville parce que vous les dégoûtez. Le problème, c’est que cette scène a lieu que vous choisissiez que le New Kid soit trans ou cis. Difficile dans ces circonstances d’y voir un propos engagé (ou même cohérent). South Park : L’Annale du Destin réussit donc mieux à rendre hommage au côté guignolesque et vulgairement drôle de la série qu’à ses velléités de critique sociétale (malgré un vernis propice comme l’utilisation d’un ersatz d’Instagram et de diverses apps pour faire tout ou presque). L’autre souci du début du jeu est à rapprocher des quêtes FedEx. En effet, si l’on peut visiter une grosse partie de la ville, de nombreux obstacles – franchissables seulement après avoir avancé dans l’intrigue – viennent entraver les chemins les plus directs et ainsi forcer les détours tout en n’apportant finalement rien d’autre que de la frustration. Surtout si l’on ajoute à ça les points de voyage rapide qui, au départ, semblent systématiquement placés aux mauvais endroits.

Chaque toilette de South Park renferme un mini-jeu. Ah l'humour à base de caca...
Chaque toilette de South Park renferme un mini-jeu. Ah l’humour à base de caca…

Si vous faites l’effort de passer ses premières heures, par contre, South Park : L’Annale du Destin prend une toute autre ampleur et devient le jeu qu’il aurait du être depuis le départ. Le propos se précise, l’intrigue prend sens, l’exploration de la ville devient plus fluide et les mini-puzzles et mini-jeux, bien que très simples, prennent enfin leur place de petit en-cas pendant un écart scénaristique. Tout à coup, voler grâce à vos pets avec The Human Kite sur votre dos ou envoyer vos flatulences dans le nez de Captain Diabetes pour provoquer sa rage destructrice deviennent des petits bonbons dont South Park a le secret pour vous faire passer un bon moment à base d’idées puériles. Et ça, c’est précisément parce qu’on a enfin l’impression de participer à une aventure et non plus de piquer le boulot d’un livreur. Petite astuce pour profiter de l’esprit de la série : jouez en VO. Vous avez peut-être entendu/lu la polémique quelque temps avant la sortie du jeu. Les voix françaises officielles des personnages de South Park, bien que promises au départ, n’ont pas pu être intégrées au jeu (je ne rentrerai pas dans les détails concernant le pourquoi du comment) et les remplaçants ne sont malheureusement pas au niveau.

TL;DR

South Park : L’Annale du Destin suit son grand frère sans jamais arriver à sa hauteur. Les bonnes idées et petites améliorations y sont pourtant nombreuses et le système de combat, notamment, est bien plus travaillé. Mais l’écriture du bébé d’Ubisoft San Francisco n’a pas le génie de celui des studios d’Obsidian, même lorsqu’il atteint son potentiel maximum après 10 heures de jeu. Il ravira toutefois les adorateurs de la série qui ne manqueront pas de succomber au fan service et aux nombreuses blagues (même si elles sont inégales). Dénué de véritable propos global, il mise sur des enchaînements de gags qui arrachent souvent un sourire, sans amener une véritable folie imaginative. Un objet de commande honnête, en somme, qui fait le job.

Le cousin de Kyle veut s'incruster, ne le laissez pas faire !
Le cousin de Kyle veut s’incruster, ne le laissez pas faire !

On aime :

  • les blagues de prout (ben oui, désolé)
  • le système de combat amélioré
  • retrouver tout l’univers de South Park

On aime moins :

  • le manque de propos global mordant
  • une première partie un peu ennuyeuse

Craquez vos PO si :

  • South Park est une religion pour vous
  • vous avez fini 5 fois Le Bâton de la Vérité et cherchez une suite

Quittez la partie si :

  • l’humour graveleux et/ou vulgaire vous horripile

Vous pouvez aussi collectionner les 41 illustrations yaoi de Tweek et Craig... Pourquoi pas après tout ?
Vous pouvez aussi collectionner les 41 illustrations yaoi de Tweek et Craig… Pourquoi pas après tout ?

South Park : L’Annale du Destin – PS4 / XBO / PC – environ 50€

Price Minister

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Test effectué sur une version PS4 offerte par l’éditeur

Ça fart

South Park : L'Annale du Destin améliore le système de combat du Bâton de la Vérité mais perd en chemin son irrévérence et son propos général. Il en résulte un jeu agréable à parcourir mais qui ne marquera sans doute pas autant les esprits que son aîné.

6
Note globale:
6

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