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[Test] Heavy Rain & Beyond : Two Souls

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Après le succès indéniable des jeux Telltale et de Life is Strange, on ne peut nier que les jeux cinématiques à choix – souvent appelés aventures interactives – ont le vent en poupe. C’était donc le moment parfait pour rappeler au bon souvenir des joueurs les jeux de Quantic Dream qui avaient ouvert la voie au principe même de ce genre de jeux dès 2010 avec Heavy Rain avant de réitérer en 2013 avec Beyond : Two Souls alors que Telltale avait dégaîné son fameux The Walking Dead. En attendant la sortie de Detroit : Become Human – le prochain titre du studio – les frenchies sortent les remasters PS4 de leurs deux derniers efforts (à l’origine sortis sur la console précédente de Sony) mais la proximité temporelle justifie-t-elle ce choix ?

 

Les tests de Heavy Rain et de Beyond : Two Souls avaient été écrits par notre chère Eskarina à l’époque de leur sortie. Je vous invite donc à aller les lire si vous voulez vous faire un avis sur les jeux eux-mêmes puisqu’on va ici principalement s’intéresser au travail effectué sur les remasters plutôt que sur les œuvres elles-mêmes. Je me permettrai tout de même quelques réflexions sur les jeux puisque mon ressenti n’est pas le même que celui développé dans les tests ci-dessus.

 

Le lifting appliqué aux jeux améliore légèrement le rendu graphique
Le lifting appliqué aux jeux améliore légèrement le rendu graphique

 

Heavy Rien

 

Il n’y a pas énormément à dire sur ces remasters pour une raison simple : très peu de choses ont changé. C’est particulièrement vrai avec Heavy Rain. A part un léger lifting pour passer le jeu en 1080p, rien n’a bougé. Certes, la réalisation d’origine étant de bonne facture, le résultat est suffisant mais l’amélioration des graphismes ne corrige pas les quelques problèmes d’animation qui nous plongent parfois en plein milieu de l’Uncanny Valley (pour ceux qui ne connaissent pas ce terme, en gros il s’agit de l’effet exagéré des petites différences avec la réalité quand des visages créés de toute pièce se rapprochent trop [mais de manière imparfaite] de véritables visages humains. Plus c’est proche, plus on voit les imperfections et plus elles nous paraissent monstrueuses). Surtout, on aurait aimé que le studio profite de cette occasion pour refondre son système de déplacement (atroce au demeurant, voir le test d’Eskarina) de personnages pour en mettre un plus intuitif, par exemple en appliquant le système de Beyond : Two Souls comme cela avait été fait dans Uncharted : The Nathan Drake Collection. Ce n’est pas le cas, dommage. Reste que le jeu est un précurseur, ce qui justifie largement de le parcourir au moins une fois si ça n’a pas encore été fait.

 

Ethan s'inquiète pour son fils pendant que la pluie camoufle ses larmes. C'est beau l'eau !
Ethan s’inquiète pour son fils pendant que la pluie camoufle ses larmes. C’est beau l’eau !

 

Beyond : Two games

 

Le travail sur le second titre est quant à lui plus intéressant. Au delà du lifting auquel a aussi eu droit Beyond : Two Souls, on retrouve des petits gimmicks sympathiques comme l’utilisation des hauts-parleurs de la manette PS4 pour amener quelques effets sonores lors du contrôle d’Aiden – le fantôme qui fait équipe avec Jodie, pour rappel – ou pour appuyer les coups reçus par l’héroïne lorsque vous ratez votre QTE pendant une rixe. A côté de ça, David Cage et son équipe se sont également inspiré des jeux Telltale et de Life is Strange (ou Catherine qu’on oublie trop souvent) pour ajouter à la fin des séquences un écran récapitulatif montrant vos choix ainsi que le pourcentage de joueurs ayant emprunté le même chemin que vous. Ce n’est certes pas indispensable mais ça modernise un peu le jeu et c’est toujours intéressant (sans compter que ça peut vous révéler des possibilités auxquelles vous n’aviez même pas songé du genre « ah mais j’aurais pu faire en sorte de ne pas prendre part à cet affrontement ? »). Certaines séquences de jeu ont également été rendues un peu plus difficiles mais cela reste un jeu très simple dans lequel vous ne pouvez de toute façon pas perdre au sens strict du terme.

 

La plus grosse nouveauté réside dans l’intronisation d’un mode de jeu chronologique. En effet, un nombre non négligeable de joueurs avaient reproché au titre d’être difficile à suivre parce que découpé de façon non linéaire et Quantic Dream a donc décidé d’offrir la possibilité de suivre une chronologie classique pour faciliter la découverte de l’intrigue. A titre personnel, je dois bien avouer que je trouve dommage de jouer dans ce mode. L’ordre original des séquences n’est pas si difficile que ça à suivre, il rythme différemment le jeu et permet même de rehausser l’intérêt narratif par le rassemblement par thèmes logiques par exemple. Il est vrai qu’il peut paraître étrange de passer de Jodie enfant à Jodie adulte pour repasser à Jodie bébé avant de retourner sur une séquence plus proche de la fin de l’histoire mais les séquences se répondent les unes aux autres et surtout cette construction permet une très bonne gestion du rythme du jeu. En effet, il gère à merveille la répartition de l’intensité inégale nécessaire à apprécier chaque phase, comme l’expliquait il y a peu l’équipe de Platinum Games pour les jeux d’action. Si vous ne connaissez pas cette explication, je vous enjoins très fortement à vous renseigner dessus, c’est très intéressant. Toujours est-il que nombre de joueurs se plaignaient de la narration et que le studio a décidé de les satisfaire. On ne peut que les en féliciter. Enfin, il est à noter que l’unique DLC de Beyond : Two Souls – nommé Advanced Experiments – est inclus d’office avec cette collection et que s’il n’est pas indispensable, son gameplay façon Portal allégé reste agréable à parcourir. D’autant qu’il ne vous faudra pas plus d’un quart d’heure pour le boucler (oui, c’est très court).

 

A vous la possibilité de jouer dans l'ordre (presque) chronologique !
A vous la possibilité de jouer dans l’ordre (presque) chronologique !

 

Quantic Awakening

 

Cette double réédition est une occasion idéale pour s’intéresser à l’évolution qui a pu s’opérer chez Quantic Dream entre les deux jeux. Et c’est là que je vais revenir sur mes différences d’opinion avec les deux tests déjà présents sur notre site. Heavy Rain est assurément un jeu important mais en tant qu’œuvre il est attaquable sur bien des points et notamment sur ce qui constitue sa moelle épinière : la narration. Victime de sa linéarité et de son écriture trop clichée, le titre rate de peu l’occasion de marquer profondément. Est-ce du à ces scènes d’exposition très peu motivantes ? Ca peut jouer. Est-ce que ça vient plutôt de ses personnages archétypaux grossiers ? Peut-être en partie. Mais avant tout Heavy Rain a un énorme problème de rythme. Le passage d’un personnage à l’autre casse régulièrement l’immersion et le choix d’ordonnancement des scènes est parfois très discutable. En effet, comment accrocher le joueur quand on le fait commencer par le moins captivant que le jeu ait à offrir ? Qui a envie de commencer un jeu en se lavant les dents et en attendant que le temps passe ? C’est le même problème qu’avait soulevé The Order : 1886 avec sa scène d’ouverture. Beyond : Two Souls, au contraire, vous plonge directement dans l’action, ce qui laisse le joueur avec tout un tas d’interrogations qu’il aura à cœur d’élucider.

 

Parcourir Beyond : Two Souls juste après son grand frère permet de se rendre compte des leçons tirées de l’expérience par l’équipe de David Cage. En effet, on y suit un personnage unique, Jodie (ok on suit aussi Aiden mais l’accent est clairement mis sur le personnage interprété par Ellen Page), ce qui facilite grandement l’identification et par là même l’immersion. De plus, comme je l’ai dit plus haut, le rythme est beaucoup mieux géré, laissant une période de respiration entre deux séquences intenses quitte à ce qu’on se demande si on n’a pas changé de jeu (je pense particulièrement à la séquence Navajo) afin que la prochaine nous marque plus. Globalement, la narration est plus réussie et dans un genre souvent qualifié de « film interactif », c’est évidemment primordial. Techniquement aussi, l’évolution est flagrante. On évite par exemple quasiment toujours l’Uncanny Valley dans ce deuxième titre à l’exception de quelques rares passage avec Willem Dafoe. Il faut bien admettre que même avec la technologie de performance capture la plus avancée du monde, le bougre a un visage pour le moins singulier qu’il est très difficile de reproduire artificiellement.

 

Oh Willem... Ton visage si étrange me ferait presque croire en Dieu.
Oh Willem… Ton visage si étrange me ferait presque croire en Dieu.

 

Pour être tout à fait franc, il faut bien admettre que si Beyond : Two Souls m’a plus marqué que Heavy Rain, c’est aussi et sans doute avant tout du aux thèmes abordés. En effet, Beyond se base sur le passage à l’âge adulte pour évoquer une multitude de thèmes que j’apprécie particulièrement allant de la conspiration au surnaturel en passant par la trahison, l’humanité, le sacrifice et plein d’autres sujets forts. Heavy Rain au contraire se contente d’une enquête assez basique qui se cantonne à questionner principalement le rapport parent-enfant (et encore, plutôt la vie de parent) de façon très artificielle et en offrant une fin totalement bancale qui aurait pu sortir de l’esprit de Shyamalan. Il ne faudrait pas non plus penser que le jeu de 2013 est parfait. L’équipe française a notamment encore du travail concernant l’arbre des possibles. En effet, chacun des jeux a une multitude de fins différentes mais elles ne diffèrent finalement que très peu et seules deux ou trois différences majeures se font sentir. C’est le gros défaut qu’on retrouve quasiment dans tous les titres de ce genre et il serait bon que quelqu’un s’attèle à le corriger. Pourquoi pas Quantic Dream ?

 

TL;DR

 

Heavy Rain & Beyond : Two Souls Collection n’est pas l’exemple de remaster le plus réussi et les joueurs possédant déjà ces titres n’auront pour ainsi dire aucun intérêt à se procurer cette nouvelle version à moins de tenir absolument à faire B:TS dans l’ordre chronologique. Ce bundle est par contre une très bonne opportunité de découvrir ces œuvres à un prix attractif puisqu’on passe de 2×70€ (si on a acheté les deux jeux à leur sortie) à seulement 40€. Soyons honnêtes, l’expérience vaut bien ce prix et vous auriez tort de bouder ces rééditions si vous n’avez jamais parcouru leur contenu.

 

Jodie, personnage badass et bien travaillé. C'est rare et ça fait plaisir.
Jodie, personnage badass et bien travaillé. C’est rare et ça fait plaisir.

 

Heavy Rain & Beyond : Two Souls Collection – Quantic Dream

Exclusivement sur PS4 – 40€

 

Test effectué sur une copie du jeu offerte par l’éditeur

 

Platinum bundle

Heavy Rain & Beyond : Two Souls Collection se contente du strict minimum en terme de remaster. Si vous possédez déjà ces jeux, vous n'avez vraiment aucun intérêt à vous procurer ce bundle. Si ce n'est pas le cas par contre, c'est une bonne occasion pour découvrir les deux jeux du studio français et vous rendre compte de son évolution.

6
Note finale:
6

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